La province de Valence est submergée : lorsque le « V » de la tempête se transforme en tragédie, l'histoire de la scientifique Serena Giacomin
La tempête stationnaire et auto-réparatrice qui a frappé l’Espagne a provoqué une inondation sans précédent. Le physicien et communicateur scientifique explique les causes de ce phénomène extrême, amplifié par le réchauffement de la Méditerranée
Comment se forment des tempêtes comme celle qui a frappé et inondé la province de Valence ? Quelles sont les causes de ces événements extrêmes qui semblent se répéter avec toujours plus de fréquence et d’intensité ? Pour mieux comprendre la tragédie qui a frappé la zone qui accueille également le Capitale verte européenne 2024nous avons interviewé Serena Giacominphysicien et communicateur scientifique, qui nous a offert une explication détaillée du phénomène.
« Dans ce contexte où les perturbations ont tendance à augmenter en intensité, une tempête en forme de V s'est formée à Valence. On l'appelle ainsi précisément parce qu'il a un forme caractéristique en « V » quand nous allons l'observer depuis le satellite », explique Giacomin.
Mais qu’est-ce qui rend ce type de tempête si dangereux ? « C'est une tempête qui s'est auto-guérison et stationnaire», poursuit Giacomin. « Ce sont deux éléments fondamentaux pour comprendre ensuite l’intensité avec laquelle ce phénomène a déversé d’énormes quantités de pluie sur le sol. Le fait qu'elle soit auto-régénératrice donne à cette tempête la capacité de se régénérer continuellement et donc de . Le fait qu'elle soit stationnaire signifie que la pluie tombe toujours sur la même portion de territoire et donc cette pluie s'accumule de manière dangereuse« .
Les données sur l’accumulation de pluie sont impressionnantes : «Il y a eu près de 350 mm de pluie en 4 heures dans l'arrière-pays près de Valence et, disons qu'en 8 à 10 heures, une quantité de pluie s'est accumulée et tombe généralement dans ces zones en un an ».
Giacomin nous aide à situer le contexte météorologique dans lequel s'est produit l'événement : « Partant de la situation atmosphérique générale sur le continent européen et surtout dans la zone de méditerranéence que nous allons observer c'est la présence de cette zone de basse pressionil faut donc bien imaginer cette zone perturbée située sur la péninsule ibérique avec un écoulement dominant dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, au sein de laquelle se produisent divers phénomènes intenses, voire carrément violents. à tel point qu'en Espagne, il y a actuellement encore une alerte en vigueur« .
« Toujours dans le contexte de la Méditerranée, nous observons plus à l'est, donc la Méditerranée centrale et aussi l'Italie vers l'Europe centrale, le renforcement non seulement des hautes pressions, on peut donc parler d'un anticyclonemais aussi la montée de l'air chaud subtropical, donc particulièrement chaud juste à l'est par rapport à l'air perturbé de la péninsule ibérique dont nous parlions ».
Cet élément, explique Giacomin, est crucial pour comprendre l’augmentation de l’énergie en jeu : « Le fait d’avoir une masse d’air particulièrement chaude qui s’est élevée au-dessus de la Méditerranée centrale contribue augmenter l'énergie impliquée d'un point de vue atmosphérique. Plus chaud équivaut à plus d’énergie, donc avec potentiellement une plus grande intensité en termes de phénomènes atmosphériques. »
À cela s’ajoutent les anomalies de température de la mer : « Nous avons aussi des anomalies au niveau de la température de surface de la mer Méditerranée, où environ 1 ou 2 degrés de plus sont enregistrés près de la péninsule ibérique« .
Mise à jour sur la situation
Pendant ce temps, le bilan des victimes des inondations continue de s’alourdir. Selon les sauveteurs, au moins 72 personnes ont perdu la vie à cause des inondations qui a particulièrement touché la province de Valence. Les dégâts sur les infrastructures sont considérables et de nombreuses zones restent isolées. Les autorités continuent de travailler sans relâche pour porter secours aux populations sinistrées et rétablir les services essentiels. La situation météorologique reste critique. Il n’est pas temps de baisser la garde.